Une vie de bergère telle qu’on devrait en voir plus souvent dans les alpages
Des génisses rentrées en journée dans l'alpage pour leur bien-être et celui du paysan
En 2014, voilà vingt-cinq ans que Claudine est salariée d’un syndicat pastoral pour son travail de bergère. Du 15 mai au 15 octobre de chaque année, elle vit dans un alpage où sa tâche principale consiste à rentrer les bêtes au chalet le matin et à les ressortir en fin d’après-midi. «Je les observe le matin et quand je vois qu’elles ont fini de manger, je les appelle pour qu’elles rentrent et je les attache chacune toujours à la même place. Je donne le foin aux veaux et fais les soins des éventuels diarrhées ou panaris. J’attends ensuite qu’elles soient bien couchées pour faire le reste du travail, vérification des clôtures et des points d’eau, élimination des chardons. Vers 17 heures, je viens les détacher». Une pratique qui a vraiment du sens, puisque Claudine peut citer au moins sept bonnes raisons de le faire :
En période chaude les vaches ne souffrent pas de la chaleur, elles sont paisibles. « Les anciens disaient « la planche (le plancher de l’écurie) fait la viande » pour dire qu’elles profitent mieux ».
Elles ne sont pas embêtées par les mouches à l’intérieur. Ces insectes peuvent d’ailleurs causer de graves problèmes sanitaires à l’extérieur, lorsqu’elles piquent les yeux (risquant de provoquer une kératite et donc une perte d’acuité visuelle) ou les trayons (développement possible d’une mammite de pâture foudroyante pouvant causer la perte d’un quartier et aller jusqu’à paralyser le train arrière).
Habituées au contact de l’homme pendant toute la période estivale, les génisses sont apprivoisées. Claudine aime d’ailleurs particulièrement les 60 génisses et veaux montbéliardes qu’elle garde. Elle passe beaucoup de temps avec eux dans l’étable et les observe longuement dans leurs parcs. «Je suis vraiment très attachée à mes bêtes. J’ai la chance de garder des animaux de trois générations, les petits veaux de 6 mois, les génisses d’un an et demi et celles de 2 ans et demi qui sont portantes. D’une année sur l’autre, je les reconnais et elles me reconnaissent aussi. A la fin de l’été, elles sont de vrais nounours. Pourtant, autour de moi, beaucoup de paysans ont fait le choix de ne plus avoir de berger par économie. Les vaches restent seules tout l’été et tendent à devenir sauvages, ce qui n’est pas pour faciliter ensuite le travail du paysan».
En étant à l’intérieur toute la journée, les vaches ne piétinent pas les parcs qui peuvent plus rapidement se reconstituer, d’où une meilleure gestion du pâturage.
Les vaches consomment beaucoup moins d’eau lorsqu’elles sont à l’attache, ce qui est intéressant dans la montagne du Jura où il n’y a pas d’eau courante mais seulement la réserve de la citerne (ici 100 m3).
Rentrer les bêtes permet encore de récupérer du fumier à épandre à l’automne (8 à 10 brouettes par jour), ce qui évite aux paysans de mettre de l’engrais chimique dans les parcs. A noter aussi qu’elles mangent un peu de la paille de la litière quand elles ont besoin de fibres.
Enfin, les soins de la bergère, et si besoin du vétérinaire ou de l’inséminateur sont facilités lorsque les génisses sont rentrées (qu’il n’est pas nécessaire d’aller les chercher dans leur pâture) et dociles. Du fait qu’elles sont attachées tous les jours, toutes ensemble, elles ne sont pas stressées en cas d’intervention (insémination…).
«Il suffit de regarder les vaches pour savoir qu’elles sont mieux dedans en journée. Très souvent, elles se pressent devant la barrière pour rentrer dans le bâtiment le matin et par contre ne se bousculent pas pour ressortir le soir, car elles savent que les mouches les attendent à la sortie. Elles passent la journée couchées à ruminer, dormir, soupirer, dans une ambiance très paisible. Quand au paysan, il aura beaucoup plus de facilité avec des vaches qui ont été attachées et seront beaucoup plus dociles».
Bergère, pas seulement un métier mais un choix de vie
Claudine a fait un véritable choix de vie en devenant bergère, «par amour de la montagne, des vaches, de la solitude et de la liberté». Dans son chalet d’alpage, elle n’a ni eau courante, ni électricité, ni téléphone, ni tout à l’égout, ni ramassage des poubelles… Une vie qu’elle trouve très exaltante mais qui peut par moment être difficile à combiner avec la vie familiale : «mes enfants passaient habituellement tout l’été avec moi au chalet. Lorsqu’ils ont été adolescents, ils n’ont plus voulu monter et j’ai dû arrêter pendant 4 ans d’être bergère. Ça a été terrible pour moi de voir arriver les printemps sans déménager vers le chalet d’alpage».
Claudine fait des animations qui plaisent bien sur «la vie au chalet» avec des classes et des touristes pour compléter sa petite paye de bergère. Une façon de sensibiliser les visiteurs de la montagne et d’échanger sur notre société de consommation actuelle…
Une bonne connaissance des plantes comestibles et médicinales de l'alpage
Claudine propose aussi des animations sur les plantes médicinales et comestibles de l’alpage. Elles explique ce que la nature peut offrir au fil des mois et comment reconnaître, consommer et transformer ces plantes (en confitures, sirops, apéritifs…).
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